Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
maman-alzheimer-et-nous.over-blog.com
maman-alzheimer-et-nous.over-blog.com
Menu

24 octobre 2017

Déjà une semaine que maman est rentrée en UHR.

Avant le jour J, j'ai tout fait pour éviter d'y penser. C'était trop angoissant et douloureux.

Heureusement, le week end qui a précédé je suis partie deux jours pour un petit séjour surprise offert par mon mari pour mon anniversaire.

Deux jours à ne penser à rien d'autre qu'à nous deux. Oublier tout en se laissant hypnotiser par le bouillonnement du jacuzzi. Laisser ses pensées, ses doutes, ses peurs se perdre dans les vapeurs du Hammam.

C'était juste un répit de deux jours, mais qu'est ce que ça fait du bien.

Les jours qui ont précédé le jour J, je me suis plongée comme une acharnée dans le travail. Encore un autre moyen de ne pas trop penser.

Le mardi midi, je suis allée déjeuner chez mes parents comme tous les jours.

Le sac de voyage était prêt depuis quelques jours, posé dans un coin de la salle à manger.

Après déjeuner, mon père est allé se reposer un peu en attendant l'heure de partir. Le connaissant, je ne suis pas sure qu'il ait réussi à dormir.

À 14:15 nous nous sommes préparés et nous sommes partis.

Pendant le court trajet, maman m'a demandé plusieurs fois où nous allions. Pas facile de trouver les bons mots. Alors j'ai "esquivé" en disant que nous avions rendez-vous à l'hôpital.

Elle me disait "mais je ne suis pas malade moi. Et après on rentre à la maison ?"

Pas facile, vraiment pas facile...



J'avais l'impression de lui mentir.

Arrivés à l'hôpital, nous avons rejoint ma sœur, mon frère, ma belle sœur et mon beau frère. Encore une arrivée en force pour entourer papa et maman.

Nous étions tous un peu tendus, même si on essayait de le cacher.

À l'UHR nous avons été accueillis par une équipe souriante. Tout le monde s'est présenté à maman pour la prendre en charge.



J'ai vu qu'elle commençait à s'inquiéter. Elle mélangeait le français, l'Italien et le sarde. Malgré tout elle essayait de rester souriante et de répondre aux questions.

Nous l'avons accompagnée dans sa chambre et elle m'a dit "n'importe quoi c'est pas ma chambre".



Il faut dire qu'elle est tristounette cette chambre. Totalement impersonnelle et froide. Il va falloir qu'on la décore et qu'on y apporte un peu de chaleur.

La chambre était pleine de monde entre l'équipe et toute la famille.



Il fallait remplir un formulaire pour connaître les habitudes de maman. J'ai trouvé bizarre que ça se fasse le jour de l'admission.

Très vite un brouhaha s'est installé et maman a commencé à se sentir un peu perdue. Je l'ai écartée un peu du groupe pour qu'elle soit moins perturbée.

Ensuite nous sommes tous retournés dans la salle commune.

Notre petite délégation a envahi les lieux et nous nous sommes installés autour d'une table. Cela nous a permis d'observer les autres résidents.

Et là franchement, c'est tout de même un choc. Maman paraît tellement normale par rapport à certains, que je me dis "non, ce n'est pas possible on ne va pas la laisser là".

Mon beau frère, lui aussi, a l'air ébranlé et il l'exprime à haute voix. Je ne me souviens plus exactement de sa phrase, mais c'était quelque chose du genre "houla y a de ces cas..."

Il est vrai que quand on voit ce monsieur qui arrive en traînant des pieds en déblatérant des "Agaga, agagaga, agaga.." sans discontinuer, ou encore cette dame qui dit quelque chose d'incompréhensible, qui agrippe ma sœur par le bras et qui ne veut plus la lâcher au risque de la faire tomber. Quand on voit tout ça, et bien si on écoutait juste notre coeur, on prendrait maman dans nos bras, on reprendrait son sac et on l'emporterait loin.

Nous avons profité de l'heure du goûter pour partir. Nous lui avons tous fait d'énormes bisous et on lui a dit qu'on reviendrait très bientôt.



Elle n'a rien dit de spécial comme si c'était normal qu'on la laisse.

J'avais le coeur très lourd mais j'ai continué à sourire. J'ai bien failli craquer en sortant de l'UHR. Je suivais mon beau frère et j'ai vu qu'il enlevait ses lunettes pour essuyer ses larmes. Son émotion m'a profondément touchée car je sais qu'il ressent un véritable amour filiale pour maman. Il a très vite essuyé ses larmes pour qu'on ne le voit pas et j'ai ravalé les miennes.

Je pense que chacun se disait qu'il ne fallait pas craquer. Les larmes des uns auraient entraîné les larmes des autres. Personnellement si j'avais commencé à pleurer je n'aurais pas pu m'arrêter.

Dans le hall, nous avons croisé la gériatre de maman. Elle nous a demandé comment cela c'était passé. Ensuite, elle a dit à mon père qu'il ne devait pas venir tous les jours, que deux fois par semaine suffisait. Le connaissant, je pense qu'elle se doutait qu'il allait venir tous les jours. Mon père est du genre à déposer une croix, pour en reprendre une aussitôt sur les épaules. Il a besoin de se reposer, il faut donc espacer les visites.

J'ai dit très rapidement au revoir à tout le monde car j'avais un rendez vous médical et je me suis sauvée. J'ai dû tenir encore quelques heures avant de rentrer à la maison et de m'effondrer dans les bras de mon mari. Il était juste derrière la porte, il m'a juste ouvert ses bras, j'avais juste besoin de ça. J'ai pu enfin libérer toutes les larmes que j'avais en moi. Plein d'émotions se mélangeaient : tristesse, culpabilité, peur...



Des émotions qui m'ont pesé plusieurs jours et qui ont mis mes nerfs à fleur de peau. Elles sont toujours présentes en moi et je pense qu'elles le seront toujours. Mais avions-nous d'autres choix ? Y avait il un meilleur choix ?



Malheureusement je ne pense pas.

24 octobre 2017