Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
maman-alzheimer-et-nous.over-blog.com
maman-alzheimer-et-nous.over-blog.com
Menu
6 semaines....

6 semaines....

6 semaines....

Déjà 6 semaines...

D'ailleurs, je ne sais pas s'il faut que je dise "déjà" ou "seulement".

Elle a déjà tellement changé en si peu de temps. Ce n'est pas possible que cela ne fasse que 6 semaines.

Tu t'attendais à quoi ma pauvre Anna ? Dans ta naïveté légendaire et avec ton caractère optimiste, tu t'attendais à un mini miracle. Voilà ce que tu attendais.

Tu t'imaginais que le plus dur était derrière toi.

Que papa serait moins fatigué, plus souriant, prêt à s'occuper de lui et recommencer à vivre une vie de vrai petit retraité.

Que maman allait "s'épanouir" voire progresser dans certains domaines dans un cadre plus stimulant, entourée de nouvelles copines et copains avec qui elle pourrait discuter.

Malheureusement la réalité est toute autre. Parce que la maladie ne lâche rien, quel que soit le cadre. Elle s'agrippe et réussit même à toujours gagner du terrain.
Pourtant les premières visites étaient encourageantes.

Je suis allée la voir la première fois, le vendredi qui suivait son entrée à l'UHR. J'y suis allée la boule au ventre, toujours sous le coup des émotions du mardi.
Lorsque je suis arrivée elle était dans la salle commune avec d'autres résidents. J'avais apporté une plante verte avec de magnifiques fleurs rouges pour décorer sa chambre.

Cela a attisé la curiosité d'un résident

"c'est son anniversaire ?"

"Non, non ce n'est pas son anniversaire"

"Ben pourquoi vous lui apportez des fleurs alors ?"

"C'est pour décorer sa chambre qui est un peu tristounette"

"Elle te plait la plante maman ?"

"Oh oui elle est magnifique tu sais que j'adore ça"

Nous sommes allées la déposer dans sa chambre et ensuite nous sommes sorties dans le petit jardinet car le soleil était au rendez-vous.

Nous nous sommes installées sur un banc et nous avons discuté. J'ai appelé ma fille en FaceTime et elle s'est jointe à nous virtuellement.

J'avoue que ce jour là, je suis partie soulagée. Le coeur plus léger, parce que je l'avais trouvée détendue et reposée.

Depuis son entrée en UHR, chacun trouve son rythme et son style de visite.

Moi, j'y vais deux fois par semaine en fin de journée après le travail. Je reste environ une heure, des fois plus, des fois moins.

J'aime être avec elle en tête à tête. Je trouve que c'est plus facile de lui parler vraiment et surtout d'essayer de la faire parler et de l'écouter.

Ses propos sont de plus en plus décousus. Elle a du mal à exprimer ce qu'elle ressent. Elle bute sur des mots, elle les cherche au tréfonds de sa mémoire.

Quand je peux, je l'aide, je lui "prête" le mot comme nous l'avait conseiilé Valery pendant la formation.

Quand je ne comprends pas trop, j'essaye de répondre quelque chose pour ne pas "casser le dialogue".

Le temps passe vite et quand l'heure du repas arrive, je l'accompagne en salle commune.

Je reste parfois pendant le début du repas, parfois pendant tout le repas. Et puis je m'en vais...

Tout se passait à peu près bien pendant quelques semaines.
Le ressenti de mon frère et ma sœur n'était pas tout à fait le même. Ils la trouvaient "perdue", angoissée. Je mettais cela sur le fait que le style de visite était différent . Ils préfèrent venir en groupe et je pensais que cela devait plus la perturber.

Avec moi aussi elle est parfois "à l'ouest" mais j'arrivais la plupart du temps à la sortir de son état pour la ramener vers moi.
Mais ça c'était avant...
Progressivement son état s'est dégradé.
Mon père a commencé à la trouver couchée en début d'après midi, en train de faire la sieste.

Maman n'a jamais fait la sieste, ça n'a jamais été son truc.

On nous a dit qu'elle était fatiguée, qu'elle avait demandé à s'allonger.

Quand je m'en suis étonnée auprès d'une aide soignante, elle m'a dit que c'était normal, que la fatigue ici n'était pas la même qu'à la maison. Le vie en communauté fatigue, soit...

Ensuite, elle a commencé à perdre l'appétit. Il est vrai qu'à la maison aussi il était difficile de la faire manger mais mon père y arrivait. Il avait l'autorité en tant que mari pour l'obliger à s'alimenter.

À l'UHR, ce n'est pas pareil.
Pourtant, une aide soignante reste à côté d'elle pour la stimuler mais cela ne suffit pas.

Quand je passe le soir j'essaye de la motiver pour qu'elle avale sa soupe mais c'est très laborieux.

Si elle prend la moitié de son bol, il faut que je m'estime heureuse.

En début de semaine, l'UHR m'a appelé le midi pour m'informer que maman avait eu un malaise sûrement dû à une déshydratation plus à de la tachycardie.

Ses pulsations sont montées à plus de 130.

Ils ont failli l'hospitaliser en cardio mais son état s'est stabilisé. Ils l'ont perfusée et fait tout un tas d'examens, prise de sang, ECG...

Elle est restée alitée une bonne partie de la journée.

J'y suis allée le soir pour prendre des nouvelles.

En arrivant, je me suis rendue directement au bureau des Infirmières pour avoir de plus amples explications.

L'infirmière de garde m'a dit que maman allait mieux et qu'elle se promenait dans la salle.

Cela m'a soulagée jusqu'au moment où une aide soignante est arrivée en disant qu'elle faisait un nouveau malaise.

Nous nous sommes précipitées dans la salle commune et j'ai trouvé maman assise sur une chaise, le teint blanc comme un linge.

Elle m'a vu et elle m'a dit "tu me ramènes chez toi ?, j'ai mal à la tête"

Elles l'ont ramenée dans sa chambre et l'ont à nouveau perfusée.

Voir maman comme ça a été un véritable supplice.

Je suis restée avec elle dans la chambre. Elle me disait "je veux mourir". J'ai essayé de la rassurer, de lui dire qu'elle s'était affaiblie parce qu'elle ne mangeait pas assez. Que bientôt il serait l'heure de manger et qu'il fallait absolument qu'elle finisse son plateau.

Elle m'a dit "d'accord je te promets".

Mais quand son dîner est arrivé il a fallu que je bataille pour lui faire avaler un peu de soupe, un peu d'omelette, un peu de fromage et un peu de salade de fruits.

Elle n'a pas tout fini mais elle s'est tout de même alimentée.

Le docteur G. est passée nous voir un peu plus tard. Elle m'a dit que le traitement de maman avait été changé. Elle lui avait donné des psychotropes pour essayer de limiter ses crises d'angoisse de fin de journée et son manque d'appétit. Peut être que sa tachycardie est liée à ce nouveau traitement ?

De toute manière elle va stopper ces psychotropes car cela n'a aucun effet sur maman.

Jeudi soir, je l'ai encore trouvée au lit, toute habillée dans le noir. J'ai réussi à la faire lever. J'ai essayé de la faire parler mais ça a été compliqué de rentrer en contact. J'avais du mal à capter son regard, impossible de la faire sourire.

Même sa chanson préférée ne la sors plus de sa tristesse.
J'ai l'impression qu'elle sombre dans une profonde dépression. Que son corps se rebelle contre la situation dans laquelle elle se trouve. Maman n'arrive plus à exprimer ce qu'elle ressent.

Son corps prend le relais...

Cette perte d'appétit, sa bouche qui ne sait plus sourire, ses yeux qui se perdent dans le vague. Tout cela ne veut dire qu'une chose : la vie m'est insupportable, je n'ai plus le goût de vivre.

Je dramatise peut être mais c'est vraiment ce que je ressens.